La relation ambivalente de la France envers le compromis politique et les coalitions

Avec aucune majorité claire pour aucun parti politique, qu’il soit au gouvernement ou non, l’incapacité historique de la France à rechercher des compromis politiques a créé une incertitude sans précédent pour les entreprises qui doivent explorer de nouvelles voies d’influence.

La gouvernance monopartite a été la norme en France pendant plus de 65 ans. À l'exception de deux courtes périodes connues sous le nom de cohabitations, où le Premier ministre et le Président provenaient de partis différents, le pays n'a jamais connu de période sans au moins un parti à la majorité relative au parlement. Cet été, la donne a changé.

La France découvre ce à quoi beaucoup de ses voisins européens se sont habitués : la nécessité de former une coalition pour assurer un travail parlementaire constructif et l'adoption fluide de nouvelles lois. Pays ancré dans la tradition, ses politiciens semblent incapables d'opérer dans ce nouveau monde de compromis et de négociation.

Ce monde n'est pas étranger au nouveau Premier ministre français, Michel Barnier, qui a construit sa réputation en tant que négociateur pour l'Union européenne. Cependant, son expertise personnelle ne semble pas se répercuter ni sur son gouvernement nouvellement formé ni sur le parlement. La droite et la droite centre peuvent être les partis dominants au gouvernement, mais elles ne détiennent que 212 des 289 voix nécessaires pour garantir une majorité au parlement, et leurs différentes factions sont divisées et souffrent de graves luttes internes. Les prochaines discussions sur le budget seront les premières à montrer l'ampleur des obstacles qui doivent être surmontés.

Composition de l'Assemblée nationale française suite aux élections législatives de 2024, provenant de Wikimedia Commons.

Ce scénario et le choix de la gauche de ne pas engager de conversations avec le gouvernement ont ouvert une voie pour l’extrême droite. Actuellement se présentant comme un parti de négociation et de gouvernance, son programme et ses priorités s’immiscent lentement dans la politique grand public. Le Rassemblement National a accompli ce que beaucoup croyaient impossible : ses députés détiennent les voix décisives et le gouvernement est à bien des égards à sa merci.

Pour les entreprises, il n’existe plus de voie claire d’influence. Chaque parti politique a un rôle à jouer et doit être courtisé de manière spécifique. Bien que cela puisse créer un sentiment d’incertitude, la plus grande faiblesse de la France est une véritable opportunité pour engager de nouvelles parties prenantes et élargir le champ des discussions politiques dans l’espoir de trouver un chemin commun pour réaliser les réformes nécessaires.

Une certitude demeure : l’impression actuelle d’un manque total de volonté politique de toutes parts pour collaborer ne fait qu’accentuer l’instabilité rencontrée par les entreprises et les parties prenantes. La France doit tirer une leçon de ses voisins européens si elle souhaite transformer sa situation politique en une opportunité de croissance et de progrès sans perdre sa position et son influence internationales.